Et oui, grace à Lui !

vendredi 1 janvier 2021

Noël en français, Nadal en catalan, Natalis en latin : il y a de la naissance là-dedans.
Jour de naissance que le jour de Noël. Mais la naissance de qui ? Grâce à qui fêtons-nous Noël ?
Ne crions pas trop vite à l’évidence.
Peut-être qu’un sondage au-delà des cercles moins culturellement chré-
tiens, nous surprendrait ou nous effarerait. La réponse ne va pas forcément de soi.
Notre société a fait du sens de Noël une sorte de quiz où les réponses sont au choix, multiples.
Les vacances, ou les fêtes, de fin d’année, ne sont plus identifiées à Noël.
Le réveillon a supplanté la messe de la nuit.
Les décors de Noël s’émancipent des références religieuses.
Les jeux, jouets, cadeaux et victuailles sont aussi innombrables sur les gondoles que les anges dans les nuées au-dessus des bergers de Bethléem.
Et les mille feux qui scintillent de toutes parts éclipsent l’étoile unique qui a brillé aux yeux des Mages.
Tout le tapage mercantile autour de Noël étouffe le cri de l’Enfant qui en motive la fête.
N’oublions quand même pas que c’est grâce à Lui que nous fêtons Noël.

Mais c’est vrai qu’il est si petit ! Qu’il en faudrait peu pour l’oublier.
Pourtant, cet Enfant, Jésus, puisque c’est bien de Lui qu’il s’agit, marque son temps, et depuis longtemps maintenant : plus de 2000 ans qu’Il a ouvert notre ère en naissant.
C’est bien là la méthode de Dieu, sa pédagogie : du petit qui devient grand et solide, de l’insignifiant qui donne du pérenne, du résistant.
Pour parler de Lui-même et de son Royaume, Jésus a employé l’image de la graine, d’une semence. Un rien, une poussière, qui porte en elle-même une puissance de vie qui la fera se développer en haute plante ou arbre robuste.
Jésus, si petit en sa naissance, porte en Lui la puissance divine qui lui fera vaincre même la mort que les hommes lui donneront si cruellement.

Non, Jésus ne craint pas d’être oublié.
Depuis Noël, Il est indéfectiblement lié à notre humanité et rien ne pourra l’en arracher.
Et depuis Pâques, ressuscité d’entre les morts, Il est présent en ce monde partout et toujours, à tous comme à chacun, et nul ne pourra l’en chasser.
La crèche est notre force, la croix notre espérance : le plus petit tient fort, la vie prend au creux de la mort.

Non, nous n’avons pas à craindre que Jésus soit oublié.
La graine peut être emportée par les pires tempêtes, recouverte par les plus imperméables sédiments, elle demeure semence et ne perd rien à attendre le terreau et les conditions favorables. Il y a même des dormances qui lui sont nécessaires.

Ce terreau favorable, où Jésus le trouvera-t-il, sinon chez nous, en nous ?
Marie, sa Mère, nous le donne ; si nous fermons nos bras, qui le prendra ?
Il ne peut demeurer dans sa crèche : il lui faut des hôtes pour l’héberger. S’il trouve portes closes chez nous, où donc sera son toit ?
Il est temps de le prendre et de l’accueillir : il demande notre foi.

Les temps que nous vivons demandent notre foi.
Comme jamais peut-être nous vivons un Noël d’incertitudes. Et de craintes : pour nous-mêmes, notre santé, notre travail, notre famille, notre société menacée par la pandémie et le terrorisme, notre monde branlant en bien des pans, notre planète qui se réchauffe. Et dans l’ombre et le silence : des migrants qui se noient, des peuples en guerre, des réfugiés, la faim, la violence, la souffrance, la mort.
Au terme de cette année qui ne mérite certes pas son 20/20, oserons-nous nous souhaiter pour la prochaine : « Bonne année ! » ?
Tellement notre moral peut être en déprime, sans voir ce qui pourrait vraiment changer.

Faut-il être d’un optimisme niais pour former encore des vœux ?
Recevons ces vers du poète René Char ( Les Matinaux) :
« L’état d’esprit du soleil levant est l’allégresse,
malgré le jour cruel et le souvenir de la nuit.
La teinte du caillot devient la rougeur de l’aurore.
« 

Appliquons-les à Jésus : Soleil levant à Noël, il provoque l’allégresse au ciel et sur la terre, et en nos cœurs.
Atteint par la cruauté, couché sur la croix et réduit à la nuit, la pourpre de son sang prend la rougeur de l’aurore de Pâques, définitive.
Nous ne sommes pas des optimistes niais et béats. Nos voeux de « Bonne année ! » prennent leur sens à Noël, mais aussi à Pâques. Le poids de la vie, Jésus l’a pris sur Lui, pour que même au cœur de la nuit, au creux de la souffrance et jusqu’au fond de la mort, il y ait toujours semence d’espérance, lueur de vie, part au bonheur.

Notre foi au Dieu fait Homme nous donne à la fois la lucidité du réalisme sur la dureté des temps et l’audace de l’espérance en Dieu Vivant, pour nous souhaiter, envers et contre tout :
 » Bonne année ! », grâce à Lui.

Père Jean-Paul Soulet