Santé !
Il serait bien étonnant qu’une bonne partie des vœux que nous avons pu échanger le mois dernier n’ait pas été consacrée à la santé : « Bonne année … et surtout la santé ! »
Et c’est bien naturel tellement, et encore plus en ces temps de pandémie, la maladie apparaît comme une bête féroce qui rôde cherchant à dévorer ou comme une épée de Damoclès dont le fil semble bien tenu au-dessus de chaque tête humaine.
Alors on émet des vœux, on formule des souhaits… on croise les doigts !
Ou bien on ose un regard vers le Ciel, dans une gamme d’attitudes qui vont de la révolte à la soumission, de la colère à la prière.
Pour comprendre Dieu et la maladie, il faut regardeR Jésus.
Sa mission de prédication s’est toujours accompagnée d’œuvres de guérisons, multiples et innombrables, qui lui valurent bien sûr un grand succès populaire.
Les évangiles soulignent que c’est la pitié envers les malades qui l’ a fait agir ainsi. C’est de la compassion de Dieu envers toute souffrance humaine dont il témoigne. Et en même temps de la puissance divine qui est à l’œuvre en Lui pour délivrer l’homme de l’emprise du mal. De cette emprise, la maladie n’est qu’une des formes. C’est pourquoi, même s’il a été généreux en guérisons, répondant largement aux nombreuses sollicitations que sa réputation lui attirait, Jésus ne s’est jamais laissé enfermer dans un rôle de thaumaturge.
Il a toujours ordonné les guérisons qu’il opérait à la foi de ceux qui en bénéficiaient. Montrant ainsi que les guérisons n’étaient qu’un signe, certes éclatant, de l’œuvre beaucoup plus radicale et définitive pour laquelle le Père l’avait envoyé : le salut. L’exemple le plus flagrant en est la guérison de ce paralytique (Matt 9,1–8) qu’on lui avait apporté sur un lit. L’évangéliste souligne bien que ce que Jésus avait d’emblée vu en lui et en ceux qui l’amènent, c’est la foi. Et aussitôt, Jésus assure cet homme de la rémission de ses péchés. L’essentiel est fait : à la foi du paralytique a correspondu le don du salut divin. Dans tout son être, l’homme est rendu à sa pleine stature de fils de Dieu. Sauvé,… mais pas guéri physiquement.
Et ce n’est que pour couper court aux mauvais sentiments des scribes qui pensent que Jésus bluffe et blasphème en s’ attribuant un pouvoir proprement divin, que dans un deuxième temps, il va accomplir le miracle de le faire lever et marcher.
La guérison comme preuve que Jésus est le Christ sauveur.
C’est le même mouvement que l’on trouve dans le finale de la prière qui accompagne l’onction des malades où le prêtre s’exprime ainsi :
« Vous ayant libéré de tout péché, que le Seigneur vous sauve et vous relève. »
Même mouvement donc qu’avec le paralytique de l’Évangile : le pardon des péchés, salut et relèvement que l’on peut comprendre comme le relèvement de la maladie, s’il plaît à Dieu, ou le relèvement dans la vie, dans le sillage du Christ relevé d’entre les morts.
En instituant, il y a 30 ans, la Journée Mondiale du Malade, le pape Saint Jean- Paul II voulait que l’Eglise exprime toujours aujourd’hui la compassion de son Seigneur envers toute personne souffrante.
Il en a fixé la célébration au 11 février, jour où l’Eglise fait mémoire de la première apparition de la Vierge Marie à Lourdes.
À Lourdes où les premières guérisons miraculeuses ont eu lieu du temps même des apparitions.
À Lourdes aussi où Marie a demandé à Sainte Bernadette de prier et de faire pénitence pour les pécheurs.
Guérisons toujours signes de rémission des péchés, unique œuvre du salut du Seigneur Jésus.
Dans les conditions sanitaires actuelles le besoin de compassion se fait plus criant. Le pape François le dit ainsi dans son message pour cette XXXème Journée Mondiale du Malade :
« Quand une personne, dans sa propre chair, fait l’expérience de la fragilité et de la souffrance à cause de la maladie, son cœur devient lourd, la peur s’accroît, les interrogations se multiplient, la demande de sens pour tout ce qui arrive devient plus urgente. Comment ne pas rappeler, à ce propos, les nombreux malades qui, durant cette pandémie, ont vécu dans la solitude d’un service de soins intensifs la dernière partie de leur existence, certes soignés par de généreux agents de santé, mais éloignés de l’affection des êtres qui leur étaient les plus chers et des personnes les plus importantes de leur vie terrestre ? D’où l’importance d’avoir auprès de soi des témoins de la charité de Dieu qui, à l’exemple de Jésus, miséricorde du Père, versent sur les plaies des malades l’huile de consolation et le vin de l’espérance. »
Être témoin de la charité de Dieu peut consister déjà, et c’est bien minimal, à respecter les consignes sanitaires préconisées même si elles nous paraissent exagérément contraignantes. Si cela permet à une personne plus fragile que nous ne pensons l’être, de se sentir plus à l’aise et mieux accueillie dans un groupe ou dans une communauté, alors oui nous aurons versé de l’huile de consolation et du vin d’espérance sur les plaies que cette pandémie ouvre dans l’unité du tissu social et ecclésial.
Père Jean-Paul Soulet